jeudi 3 janvier 2019

Quelques remarques sur les revues dites traditionnelles


Quelques remarques sur les revues dites traditionnelles

Décidemment M. Gayat (Julien Arland) tient à nous donner une place de choix dans sa revue. Il nous a déjà consacré un long article très embrouillé dans le numéro 6 (Julien Arland, «Remarques sur une forme de la mentalité antitraditionnelle», n° 6, avril-mai-juin, 2017.) (https://www.cahiersdelunite.com/remarques-1) et maintenant dans son numéro 12 (car 6 + 6 = 12) il nous associe à un groupe d’universitaires qui ne correspond en rien à notre identité:

« MM. Jean-Pierre Laurant, Patrick Ringgenberg, Roger Dachez, David Bisson, Jean-Marc Vivenza, Bruno Hapel, Jean-Louis Gabin, Slimane Rezki ou Paul Fenton » (https://www.cahiersdelunite.com/confusions)

Sa revue est une revue bâtarde née sur internet et usant d’internet pour se donner une existence papier par le jeu de la reproduction à l’unité offerte par le site LULU.com.

On peut lire cette annonce qui démontre que le revue n’existe pas hors d’internet et échappe au monde ancien du livre : « Nous informons Mesdames et Messieurs les libraires de l’Union européenne que nous ne pratiquons pas de remise pour la vente en librairie. » (https://www.cahiersdelunite.com/libraires)

Une seule revue peut incontestablement être considérée comme traditionnelle, il s’agit bien évidemment de celle à laquelle collabora René Guénon : La Revue des Etudes Traditionnelles. Après la disparition de René Guénon cette revue a connu une perte irrémédiable d’identité, une brusque descente qualitative pour fort heureusement et finalement cesser d’être publiée.

Avant l’avènement d’internet un certain nombre de revues ont tenté de s’inscrire dans cet esprit traditionnel avec plus ou moins de succès.et d’authenticité. En ce début d’année 2019, une seule revue dite traditionnelle surnage encore avec une diffusion en librairies. Il s’agit de Vers La Tradition. Nous n’en commenterons pas le contenu qui ne reflète plus que l’épuisement qui caractérise notre époque.

Dans le numéro 6 de sa revue, M. Gayat / Arland écrivait donc ainsi :

« De 2002 à 2003, dans cinq séries d’une dizaine de photocopies agrafées, et placées par inconscience, mais de manière profanatoire, sous le saint nom de Ganesha, M. Hapel, sous différents pseudonymes, laissait libre cours à ses obsessions haineuses que l’on retrouve aujourd’hui inchangées, formulées dans le même galimatias. La laideur dans la mise en page, l’incohérence dans le style et les trop nombreuses fautes d’orthographes ont valeur de signe chez lui : elles font sens. Tout le monde aura compris que ses récentes interventions relèvent d’une forme de ce que le jargon de l’Internet désigne comme le trolling, c’est-à-dire d’une volonté de polémiquer qui a sa source première dans le désœuvrement du troll, et dans son déséquilibre moral et psychique. C’est ce qui peut notamment expliquer pourquoi il peut être un support privilégié d’influences antitraditionnelles. »

Nous devons informé M. Arland / Gayat, que de 2002 à 2003 la revue intitulée Ganesha – Etudes de l’œuvre de René Guénon, a connu 8 numéros. Cette revue a été crée par M. Bernard Fontaine, directeur et seul intervenant dans le choix du titre et de la mise en forme de la revue. Il se trompe totalement en parlant à notre endroit de « nombreux pseudonymes ». Nous n’avons été que l’un des collaborateurs de cette revue et rien de plus. Nous notons que M. Gayat affectionne le charabia d’internet. Nous ne connaissions pas ce jargon dont il semble être un spécialiste. Notre présence bien modeste sur internet se limite à la publication de 2 blogs et nous ne pouvons donc être identifié à ces personnages qui hantent la toile comme semble le faire M. Gayat avec sa cohorte de fantômes qui se dissimulent sous des pseudonymes parfois vraiment ridicules. D’ailleurs faut-il écrire Cahiers de l’unité ou de l’Unité ? On peut lire cette déclaration dans le premier éditorial de la revue (souligné par nous):


« Il n’existe aujourd’hui, à notre connaissance, aucun site d’études en langue française qui soit l’expression régulière de la conscience de l’unité essentielle de toutes les formes traditionnelles. C’est la raison pour laquelle il nous a paru nécessaire d’en créer un. C’est parce que toutes les traditions procèdent d’un même Principe que cette conscience de leur unité essentielle est possible. De même que toutes les couleurs ne sont qu’une différenciation de la lumière blanche, on peut dire que la diversité des formes traditionnelles, ou des religions si l’on veut, n’est que l’expression différenciée de cette unité fondamentale. À l’instar du fait que la lumière blanche n’est pas une couleur, le point de vue auquel se réfère proprement cette conscience de l’unité traditionnelle est distinct de celui qui se rapporte aux questions religieuses extérieures. Par conséquent, celles-ci sont hors du champ de notre revue. »

On aura noté que le terme « unité » n’est pas écrit avec un u majuscule. Pourquoi alors la revue ne porte-t-elle pas le titre de Cahiers de l’unité qui paraît bien plus adapté ?  Car parler de Cahiers de l’Unité, c’est entendre Cahiers de l’Être. Cette majuscule en dit long sur le niveau d’orgueil des promoteurs et auteurs de cette revue. On attribue à Mohyiddin ibn Arabi un Traité de l’Unité (cité par René Guénon), les auteurs de cette revue ont-ils la prétention d’avoir atteint le même degré de connaissance que ces autorités incontestables?

On comprend alors que la seule contribution qui mérite une attention est celle posthume de René Guénon que les promoteurs de cette revue ne sont même pas capables de respecter réellement.

Dans son éditorial du numéro 9 de sa revue, M. Gayat confirme sa perte totale de tout bon sens et son incroyable ignorance :

« M. Greif poursuit son travail sur les « Amis de Dieu » en abordant la question de la hiérarchie spirituelle dans l’œuvre de Jean de Ruysbroeck. Ceux qui sont bien informés sur ces questions savent que celui-ci était le détenteur d’une des grandes fonctions initiatiques de la fin du moyen âge. Ils savent aussi que Ruysbroeck avait atteint la plénitude de la réalisation effective, il était parvenu à la perfection dans l’ordre des « grands mystères ». C’est dire l’intérêt qu’il y a à revenir sur ses écrits. »

M. Michel rouge nous apprend d’autre part que cette série d’articles avait commencé à paraître dans Vers La Tradition sous un autre pseudonyme (encore un autre…)

 « Font suite « Les “Amis de Dieu” » de Steffen Grief, quatrième livraison d’une étude qui vit le jour (sous un autre pseudonyme) dans le numéro 122 de Vers la Tradition. Après avoir abordé Maître Eckhart et Ruysbroeck, c’est au tour de Tauler, »


M. Michel Rouge est d’ailleurs à l’honneur dans ce numéro 12 de la revue de M. Gayat (Julien Arland, « Remarques sur certaines confusions », n° 12). Ce dernier, (après avoir cité un long passage du blog de M. Rouge sans en donner les références qui auraient permis de se faire sa propre idée sur les critiques que M. Gayat distillent), écrit ainsi avec une belle hypocrisie  ou lâcheté (https://www.cahiersdelunite.com/notes-confusions):

« Nous ne pensons pas qu’il soit utile de citer le nom de son auteur. Nous nous situons seulement dans le domaine intellectuel, et n’avons évidemment aucune animosité personnelle contre lui. » 
 Voici la référence des passages du blog que M. Gayat éreinte sans « animosité !!!» : http://lafindestempsmodernes.blogspot.com/2018/05/presentation-de-la-fin-des-temps.html

Signalons enfin les signes d’une sérieuse difficulté à alimenté la revue liée sans doute au faible nombre des collaborateurs autres que MM. Gayat et Brecq…Ainsi M. Brecq doit-il rebrasser d’anciens textes :

Cette étude a été rédigée il y a plusieurs années. Nous en avons modifié la forme pour qu’elle puisse paraître dans cette revue, et l’avons aussi “actualisée” sur certaines questions. Nous ne publierons que la partie introductive et un chapitre concernant l’un des Maîtres hindous de René Guénon.



Pour mémoire – réponse à M. Gayat :

Nul n’ignore que notre humanité soit très proche de la fin de son propre cycle. Naître et vivre alors que notre Manvantara touche à sa fin présente spirituellement de nombreux désavantages.

René Guénon a apporté d’amples explications sur ce qu’il convenait de comprendre lorsque l’on parle de « qualification ». Un lecteur de son œuvre en arrivera logiquement à se poser cette question : celle de sa propre qualification ou plutôt de son niveau de disqualification.

Comme nous l’avons déjà précisé, l’attitude habituelle en réponse à cette question est de se considérer toujours comme qualifié sinon même comme très qualifié. L’ego n’aime pas reconnaître ses éventuelles insuffisances.

Tous les « guénoniens », en se définissant d’ailleurs comme tels, se reconnaissent toujours comme  « très qualifiés ». Ils ne se posent pas la question de savoir ce que pourrait cacher une telle prétention. Ils ne réfléchissent pas et se lancent à la recherche d’une initiation sans trop se soucier des conditions pour l’obtenir. Tous les « guénoniens » finissent ainsi par être initiés ce qui a posteriori les rassure illusoirement en semblant confirmer leurs prétentions. Etant maintenant initiés, souvent initiés après une conversion, ils croient avoir ainsi démontré qu’ils étaient qualifiés puisqu’ils sont bien reconnus comme « initiés », initiés virtuels bien évidemment et qui le resteront mais qu’importe pour eux. Et les pseudo- maîtres abondent pour délivrer ces initiations sans aucune condition réelle de qualification. Mais pourquoi une telle précipitation ?

René Guénon a expliqué de façon très précise ce qu’il fallait entendre par « initiation » mais il n’a jamais dit qu’il fallait être initié à tout prix, dans l’urgence.

Une des premières erreurs que commettent généralement les « guénoniens » consiste à s’enfermer dans l’état humain et de ne penser « qualification » que par rapport à cet état sans tenir compte du fait qu’un être peut avoir plus de possibilités dans un futur état qu’il n’en a actuellement dans son état humain. Ils négligent ainsi les états posthumes et surestiment leurs qualifications présentes par orgueil bien évidemment mais aussi et surtout par simple angoisse. Ils veulent obtenir un aboutissement immédiat dans cet état sans autre analyse et sans prise en compte des réalités. Ils n’hésitent pas ainsi à rejeter leur tradition d’origine, leur rattachement d’enfance. Ils n’hésitent pas ou si peu à trahir leurs engagements pris dans leur jeunesse (comme par exemple à l’occasion de leur confirmation pour les Catholiques). Ils n’ont ainsi pas de parole. Ils se pensent tous comme des exceptions et croient qu’ils peuvent ainsi faire tout ce qu’ils veulent sans en admettre les conséquences. Mais par définition les exceptions sont « exceptionnels » et spirituellement vraiment très improbables en fin ultime du Kali-yuga. Qui parmi ces « guénoniens » pourrait prétendre être comparable à René Guénon ou à Râmana Maharshi ? Visiblement tous les « guénoniens » y prétendent. Les « guénoniens » en se convertissant massivement à l’Islam n’ont souvent fait qu’une seule chose : se transformer en soufis virtuels et en réalité en orientalistes inconscients, rejetant leur exotérisme d’origine pour adopter bien imparfaitement un exotérisme plus exotique. Et ils n’ont rien obtenu, tout est bien évidemment resté plus que virtuel si l’on peut s’exprimer ainsi. Ils n’obtiendront même pas les recours de leur tradition d’origine. Une trahison pour rien donc. L’orgueil seul est le vainqueur.

Cela montre une belle absence de discernement. Et pourtant on ne peut pas reprocher à René Guénon d’avoir manqué de faire toutes les mises en garde qui convenaient. Car enfin, si le destin nous a fait naître au sein d’une tradition particulière, il y sans doute de bonnes raisons pour cela. La manifestation n’est pas un simple chaos mais bien l’ « expression » du Principe. Il y a des règles et bien évidemment des exceptions à la règle. Mais qui peut légitiment prétendre être une exception ?

Ainsi les « guénoniens » initiés pour garantir leurs qualifications illusoires doivent être en mesure de montrer que ceux qui les ont initiés sont eux aussi très qualifiés. Les disciples doivent défendre leur maître envers et contre tout sinon c’est leurs propres prétentions à la qualification et leurs initiations qui sont remises en question.

On en voit certains pousser des « cris » sur Internet,  multiplier les traductions de textes soufis et transformer l’arabe classique en une langue profane comme le français et les diffuser sur de multiples sites virtuels. Mais pourquoi ? Et pour qui ? L’ésotérisme islamique pour la masse des francophones ? C’est une nourriture inassimilable. C’est en toute conscience que René Guénon n’avait surtout pas pris l’Islam comme référence pour exposer les données traditionnelles et spirituelles fondamentales aux Occidentaux. La réalité n’a pas changé. Ou alors en sommes-nous au stade où c’est l’œuvre de René Guénon qui devrait apporter aux Orientaux ces données traditionnelles et spirituelles qu’ils ont maintenant perdues ? Mais si c’est le cas, ce n’est toujours pas sur l’Islam qu’il faut s’appuyer mais sur l’Hindouisme qui reste la meilleure référence. Le constat n’a pas changé.

L’être qui s’interroge sur sa qualification le fait dans le monde manifesté. Il n’y a que dans la manifestation que cette notion intervient. Et comme la manifestation est nulle vis-à-vis du Principe. On comprend alors que du point de vue du Principe la disqualification est sans objet puisqu’elle porte sur une illusion, une surimposition illusoire. Du point de vue du Principe chacun de nous est un jnânî !

En 2001, les Editions Traditionnelles ont publié un ouvrage commémoratif intitulé : Il y a cinquante ans, René Guénon

Nous avons collaboré à cet ouvrage avec un article intitulé : « Le guénonisme contre René Guénon ». Dans le n° 13 de la Règle d’Abraham (juin 2002), M. Cyrille Gayat  a rendu compte de cet ouvrage. Concernant notre contribution, voici ce qu’il a écrit:

« Nous terminerons avec le texte malheureusement laborieux et incohérent de M. Bruno Hapel. On s’étonne un peu d’observer qu’il persiste à s’occuper de questions doctrinales alors qu’à la page 231 de son dernier « dossier », [René Guénon et le Roi du Monde], il a trouvé utile de confesser (c’est son terme) sa « disqualification irrémédiable ». Cette franchise l’honore, mais elle n’était pas vraiment utile en ce qui le concerne : ses ouvrages ne permettaient pas d’en douter. Nous le démontrerons à une autre occasion pour ceux qui ne s’en seraient pas encore aperçus. »

A notre connaissance M. Gayat n’en a toujours pas apporté la démonstration et pourtant de nombreuses années se sont déjà écoulées. Voici précisément ce que nous avons écrit dans notre dossier (p. 231) :

« Dire que nous approchons du terme de la présente humanité, c’est nécessairement reconnaître que la disqualification doit avoir force de loi. La fin d’un cycle étant en correspondance inverse avec son origine, la tendance qualifiante du temps présent doit être à l’image de la tendance disqualifiante de l’âge d’Or ! Ainsi c’est non sans regret que nous devons confesser notre disqualification irrémédiable. Que l’on se rassure cette tendance disqualifiante ne peut être absolue. Il nous faut calmer ces quelques frémissements d’impatience condescendante. Car enfin, peut-on avoir l’outrecuidance de nier la qualification de tel ou tel ? En Occident n’y a-t-il pas eu René Guénon ? Et bien oui justement, car voici l’exception qui confirme la règle. »

M. Gayat utilise une méthode peu honorable. Il se permet, comme on le voit et on le verra, de n’extraire que des mots ou des bouts de phrase sachant très bien que s’il avait dû citer notre texte correctement, toute sa pseudo-démonstration se serait immédiatement effondrée. Nous verrons d’ailleurs que même lorsqu’il ne mentionne qu’un extrait d’une de nos phrases, il ne se rend même pas compte qu’ainsi c’est sa propre ignorance qu’il ne fait que dévoiler.

Nous sommes né en Occident dans ce monde moderne, né en cette fin ultime du Kali-yuga, nous n’avons pas cet orgueil propre aux « guénoniens » de nous considérer comme une exception, comme un individu hautement qualifié. Inconnu des Loges et des Turuq, nous n’avons jamais eu pour objectif de singer la vie de René Guénon. Nous ne prétendons être ni le disciple de René Guénon, ni un continuateur. Si Râmana Maharshi et René Guénon ont préféré ne pas avoir à désigner et à reconnaître tel ou tel individu comme un éventuel disciple, c’est très vraisemblablement pour ne pas avoir à blesser tous ces individus qui les ont sollicités et qui prétendaient à des qualifications qu’ils n’avaient pas. Il est préférable de refuser de désigner des disciples quand on sait que la possibilité d’en découvrir est quasiment nulle. Et partout des pseudo-maîtres sont apparus en nombre pour prétendre combler cette lacune et distribuer ainsi des initiations en masse. Les pseudo-continuateurs de Râmana Maharshi comme de René Guénon sont sans cesse plus nombreux.

M. Gayat poursuit un peu plus loin :

« Une fois de plus, contre toute évidence, M. Hapel continue de prétendre que la correspondance de René Guénon ne doit pas être prise en considération. Pourtant, dans le « dossier » que nous venons d’évoquer, au sujet de la « tendance disqualifiante » (sic) générale de notre époque dont il déclarait qu’elle a « force de loi » pour tout le monde, c’est une lettre de Guénon qui rectifie son erreur : « …Et pourquoi écrirais-je s’il n’y en avait pas ? » disait-il le 5 octobre 1946 à propos des exceptions individuelles qui existent chez les occidentaux. Il est vrai que maintenant pour M. Hapel, « nous sommes tous des jnânîs, des ‘connaissants’ » (p. 125). »

Voici notre phrase complète qui figure à la page 125 de cet ouvrage collectif:

« Nous sommes tous des jnânîs, des ‘connaissants’, mais très rares sont ceux qui le réalisent effectivement, qui réalisent l’identification du Connaissant, du Connu et de la Connaissance. »

En ne reproduisant avec ironie que le début de cette phrase M. Gayat montre ainsi qu’il ignore tout de la Réalisation spirituelle. Le début même de cette phrase figure dans une réponse donnée par Râmana Maharshi :

« Le jnânî ne voit personne qui soit a-jnânî. De son point de vue, chacun est un jnânî. Dans l’état d’ignorance, on surimpose cette ignorance à ce qui est réellement l’état de jnânî ». [Talks, p. 480]) (https://brunohapel.blogspot.com/2018/10/ramana-maharshi-lesprit-du-silence.html)

Mais M. Gayat considère sans doute Râmana Maharshi comme peu qualifié... Ce n’est donc pas « pour M. Hapel » comme il veut se moquer mais bien pour l’humanité tout entière que ce début de phrase est par principe parfaitement exact. La Réalisation spirituelle (qui est l’état effectif de jnânî) étant par essence inconditionnée, ne peut être l’aboutissement d’un quelconque enchaînement. Ainsi si nous n’étions pas tous des jnânîs nous ne pourrions jamais le réaliser (ce qui ne veut pas dire que ce que nous sommes virtuellement dans l’état humain doive impérativement devenir effectif dans ce même état). La Réalisation n’est que le constat de notre ultime Réalité. La Vérité n’est que la dissipation de l’ignorance qui ne fait que la voiler. La Vérité est et n’a donc jamais cessé d’être présente.

Laissant entendre faussement que nous nions l’existence d’exceptions individuelles occidentales, M. Gayat s’arme alors des quelques mots extraits d’une lettre de René Guénon qui doit tout anéantir et le rendre invincible. Le contenu de cette lettre est invérifiable, le destinataire est inconnu; la date seule, 5 octobre 1946, la cristallise dans l’Histoire. On agite ces quelques mots comme une formule magique qui doit nous terrasser... M. Gayat n’a visiblement jamais lu Orient et Occident où il est fait état de ces exceptions individuelles ! Il semble bien trop banal de se référer à l’œuvre publique lorsque l’on veut à tout prix justifier la profanation de la vie privée de René Guénon. Sa correspondance doit être dévoilée envers et contre tout.

M. Gayat poursuit son compte rendu ainsi:

 « En traitant de ce qu’il ignore, M. Hapel avait aggravé son cas en affirmant péremptoirement que « le contenu de la correspondance ne peut avoir qu’une valeur marginale » (p. 162). On peut lui demander alors ce qu’il pense du « Triangle de l’Androgyne » ? On s’en souvient, cette « sorte de ‘sceau’ des deux sciences sacrées des Nombres et des Lettres » a été transmise en 1945 dans une lettre par René Guénon à Michel Vâlsan, qui l’a fait connaître de la manière remarquable que l’on sait. Il est vrai encore que M. Hapel, sans argument, reproche à Michel Vâlsan d’avoir fait « état de sa correspondance avec R. Guénon, ce qui ne pouvait se légitimer » (p. 242). S’agissant de questions doctrinales, on se demande bien pourquoi ? M. Hapel est victime de ce travers dont nous avons déjà eu l’occasion de parler : une fois sa théorie formée, il tente d’y faire entrer de force certains éléments au lieu de s’assurer que ceux-ci ne la modifient pas. »

Voici précisément ce que nous écrivions dans notre dossier (p. 242.) :

« M. Vâlsan a préparé le troisième [ouvrage posthume] intitulé dans un premier temps Symboles fondamentaux de la Science sacrée. Dans cet ouvrage, M. Vâlsan a fait preuve de partialité en ne reproduisant pas l’intégralité des articles écrits par R. Guénon pour la revue Regnabit, ou en faisant état de sa correspondance avec R. Guénon ce qui ne pouvait se légitimer. Au lieu d’avoir été refait, l’ouvrage paraît maintenant sous le titre Symboles de la Science sacrée dans une version abrégée, censurée, ce qui le rend peu présentable. Ainsi là encore c’est l’œuvre de R. Guénon qui en pâtit. »

Rappelons que s’il y a bien des données traditionnelles dans la correspondance de René Guénon et que ces données sont bien impersonnelles puisque la Vérité n’est pas personnelle et même proprement inexprimable, ces données lorsqu’elles sont exprimées par René Guénon dans sa correspondance sont alors personnelles dans leur expression même et c’est cette expression privée que l’on ne doit pas reproduire par simple respect (exception faite éventuellement et uniquement pour le correspondant lui-même à qui René Guénon avait écrit). S’il avait voulu publier sa correspondance avec tel ou tel de ses correspondants, il aurait très bien pu le faire. Il pouvait ainsi si la question proprement islamique du « Triangle de l’Androgyne » présentait une réelle importance compléter son propre article sur cette question. Il ne l’a pas fait. Et comme nous l’avons déjà précisé le commentaire fait pour la tradition islamique par Michel Vâlsan concernant ce « Triangle de l’Androgyne » peut également se faire de façon tout aussi pertinente dans la tradition juive selon la science des Nombres et la science des Lettres hébraïques.

Ainsi dans la préparation de l’ouvrage posthume, M. Vâlsan devait se faire le plus discret possible, s’effacer totalement devant l’œuvre de René Guénon. Rassembler les articles sans ajouter le moindre commentaire sauf l’indication de la date de publication et de la revue concernée. Il ne devait en aucune façon faire état dans cet ouvrage posthume des courriers échangés avec René Guénon. Si M. Vâlsan souhaitait utiliser cet échange épistolaire pour le citer et en faire un commentaire, ce qui était tout à fait son droit légitime, il devait alors proposer ses propres explications dans un ouvrage à part et sous son propre nom d’auteur.

Sur la question de la correspondance, notre point de vue n’est pas influencé par l’existence d’un pseudo-maître. Nous sommes simplement à l’écoute de René Guénon lui-même (Voir les post-scriptum et notamment celui reproduit ici  http://blog-bruno-hapel.blogspot.com/2018/11/rose-cross-books.html) et nous n’avons aucune raison de ne pas respecter sa vie privée. Nous ne sommes pas sous l’emprise d’une « théorie formée ».  Mais il est bien certain par contre que M. Gayat n’est pas dans la même situation de détachement. Car si  la correspondance n’est pas reconnue comme partie intégrante de l’œuvre de René Guénon, les titres donnés à Michel Vâlsan comme continuateur, comme maître éminent, comme « guénonien » d’exception deviennent alors injustifiables…

Il est vraiment significatif de voir que ceux qui sont les plus favorables à la diffusion des lettres écrites par René Guénon sont en tout premier lieu les universitaires. On ne peut en être surpris puisqu’ils n’ont qu’un objectif celui de profaner. On ne doit pas être étonné par contre de voir que ceux qui les suivent avec tout autant de persévérance sont les orientalistes soufis (Occidentaux convertis ou Musulmans de souche plus ou moins occidentalisés). Ces orientalistes soufis sont parfois et souvent d’ailleurs des universitaires. On pose ainsi une sorte de distinction tout à fait étonnante entre des universitaires musulmans soufis déclarés comme respectueux de la tradition et les autres universitaires déclarés comme des profanes. Nous n’y voyons pour notre part qu’un seul ensemble : des individus hostiles à l’esprit traditionnel.