mercredi 31 octobre 2018

Une dérive « fractale » ?


Une dérive « fractale » ?



La collection « Points », série « Sagesses », des éditions Points  (anciennement éditions du Seuil) s’est enrichie d’un nouveau titre: René Guénon, le visage de l’éternité, par Erik Sablé.

L’opuscule compte 5 chapitres. Le premier s’intitule : « l’infini » et non l’Infini, la nuance est plus que significative comme on le verra. Ce chapitre commence de la meilleure des façons, E. Sablé écrit en effet :

« Pour aborder l’œuvre de Guénon, il est nécessaire de se familiariser avec sa langue. Une langue dense où chaque mot est à sa place et possède une signification précise. Une langue fondée sur des distinctions subtiles qu’il faut connaître pour s’ouvrir au sens réel de sa parole. Cela demande une fréquentation de l’œuvre, une écoute du texte guénonien, qui est, en fait, d’une grande clarté, mais avec lequel il faut se familiariser pour qu’il révèle tout son sens  (p. 25). »

Après ce préambule très convaincant, l’auteur aurait dû proposer de larges extraits de cette œuvre. Mais fâcheusement l’auteur va alors se lancer dans des discours qui sont très loin de la clarté et de la précision de René Guénon. Il écrit ainsi :

« Car l’infini peut faire l’objet d’une connaissance intuitive. Il n’est pas une simple abstraction, mais il peut être réalisé lorsque nous sommes « entièrement affranchis des conditions limitatives de l’existence individuelle [R. Guénon, Les États multiples de l’être] ». Cela n’est possible que parce que l’être humain est d’essence spirituelle : il n’est pas simplement un animal raisonnable, mais un être habité au plus profond par la présence de l’infini (p. 28). »

Voyons d’abord le passage du chapitre intitulé l’Être et le Non-Être des États multiples de l’être d’où sont extraits imparfaitement les mots (soulignés par nous) cités par E. Sablé :

« Quant aux possibilités de non-manifestation, elles appartiennent essentiellement au Non-Être, et, par leur nature-même, elles ne peuvent pas entrer dans le domaine de l’Être, contrairement à ce qui a lieu pour les possibilités de manifestation ; mais, comme nous l’avons dit plus haut, cela n’implique aucune supériorité des unes sur les autres, puisque les unes et les autres ont seulement des modes de réalité différents et conformes à leurs natures respectives ; et la distinction même de l’Être et du Non-Être est, somme toute, purement contingente, puisqu’elle ne peut être faite que du point de vue de la manifestation, qui est lui-même essentiellement contingent. Ceci, d’ailleurs, ne diminue en rien l’importance que cette distinction a pour nous, étant donné que, dans notre état actuel, il ne nous est pas possible de nous placer effectivement à un point de vue autre que celui-là, qui est le nôtre en tant que nous appartenons nous-mêmes, comme êtres conditionnés et individuels, au domaine de la manifestation, et que nous ne pouvons dépasser qu’en nous affranchissant entièrement, par la réalisation métaphysique, des conditions limitatives de l’existence individuelle. »

René Guénon parle de réalisation métaphysique. M. Sablé ne voit pas l’absurdité de ce qu’il écrit. On ne réalise pas l’Infini. Il n’y a pas une réalisation virtuelle ou effective de l’Infini. L’Infini est l’Infini. Etant la Réalité totale, Il n’a pas à se réaliser. Dire qu’il n’est pas une simple abstraction voudrait faire entendre qu’il est concret. Les mots choisis par M. Sablé sont parfaitement inadaptés. L’Infini est bien évidemment au-delà de toutes ces catégories, de toutes ces oppositions. On constate immédiatement que l’auteur déforme les propos exacts de René Guénon et tout au long de son livre, il va ainsi dénaturer sa pensée pour n’en offrir qu’une caricature.

Mais poursuivons notre citation de la page 28 de l’opuscule de M. Sablé :

« Cette identité de l’homme en son essence avec l’infini – la Totalité Une – est sans doute l’aspect le plus surprenant des doctrines traditionnelles. Au fond, derrière les apparences, les illusions qui nous emportent, nous sommes « Dieu », nous nous identifions à cette réalité infinie. La Tradition, qu’elle soit d’expression juive, musulmane, chrétienne, hindoue ou bouddhiste, nous enseigne comment réaliser cette essence « supra-individuelle ». Il n’est pas question de croyances, toujours susceptibles d’être mises en doute, mais bien de réalisation, de vivre l’infini en soi. »

C’est l’auteur qui souligne cette formulation improbable « nous sommes Dieu ». S’il y avait identification de l’ «essence de l’homme » avec l’Infini cela voudrait inférer que la substance de l’homme est hors de l’Infini et par conséquent que l’Infini n’est pas Infini puisqu’il serait alors limité par cette absence. M. Sablé aime la littérature, la Vérité lui est indifférente. Pour faire de beaux discours il n’hésite pas à travestir le vrai. Qui se cache derrière ce « nous » qui voudrait être l’égal de Dieu ? L’ego de M. Sablé bien évidemment et l’ego du lecteur qui se berce aux fables de M. Sablé : une grenouille aussi grosse que le bœuf !

Pour M. Sablé, la réalisation serait aussi inconstante que la vie. « Vivre l’infini en soi », une formule comme les aiment les férus du New Age. Réduire l’Infini à ces quelques litres de sang qui circulent dans nos veines. M. Sablé ne sait peut-être pas faire de distinction entre sa formule douteuse « vivre l’infini en soi » et cette autre mode d’expression qui répond à une perspective traditionnelle « réaliser effectivement le Soi ».

Les pages vont se succéder et l’auteur va pourvoir ainsi poursuivre son à-peu-près. Un autre exemple, un nouvel extrait:

« Cette Identité suprême, cet état de délivrance, de libération, d’union au Divin, est décrit par Guénon comme une expérience par laquelle l’être est « dilaté au-delà de toute limite » et cesse d’exister en tant qu’individu pour devenir une « conscience omniprésente ». Cet état a été vécu par les grands spirituels de toutes les religions (p. 29). »

René Guénon ne parle pas d’expérience ce qui serait totalement impropre mais bien de « transformation » et cette description n’est pas « de Guénon », voici ce qu’il écrit précisément au chapitre XX intitulé Différence des conditions posthumes suivant les degrés de la connaissance de L’homme et son devenir selon le Vêdânta :

« Plusieurs commentateurs des Brahma-Sûtras, pour marquer encore plus nettement le caractère de cette « transformation » (nous prenons ce mot dans son sens strictement étymologique, qui est celui de « passage hors de la forme »), la comparent à la disparition de l’eau dont on a arrosé une pierre brûlante. En effet, cette eau est « transformée » au contact de la pierre, du moins en ce sens relatif qu’elle a perdu sa forme visible (et non pas toute forme, puisqu’elle continue évidemment à appartenir à l’ordre corporel), mais sans qu’on puisse dire pour cela qu’elle a été absorbée par cette pierre, puisque, en réalité, elle s’est évaporée dans l’atmosphère, où elle demeure dans un état imperceptible à la vue. De même, l’être n’est point « absorbé » en obtenant la « Délivrance », bien que cela puisse sembler ainsi du point de vue de la manifestation, pour laquelle la « transformation » apparaît comme une « destruction » ; si on se place dans la réalité absolue, qui seule demeure pour lui, il est au contraire dilaté au delà de toute limite, si l’on peut employer une telle façon de parler (qui traduit exactement le symbolisme de la vapeur d’eau se répandant indéfiniment dans l’atmosphère), puisqu’il a effectivement réalisé la plénitude de ses possibilités. »

L’expression « conscience omniprésente » a quant à elle été détachée arbitrairement du chapitre XXII du même ouvrage et intitulé Le « voyage divin » de l’être en voie de libération :

«  L’« Identité Suprême » est donc la finalité de l’être « délivré », c’est-à-dire affranchi des conditions de l’existence individuelle humaine, ainsi que de toutes autres conditions particulières et limitatives (upâdhis), qui sont regardées comme autant de liens. Lorsque l’homme (ou plutôt l’être qui était précédemment dans l’état humain) est ainsi « délivré », le « Soi » (Âtmâ) est pleinement réalisé dans sa propre nature « non-divisée », et il est alors, suivant Audulomi, une conscience omniprésente (ayant pour attribut chaitanya) ; c’est ce qu’enseigne aussi Jaimini, mais en spécifiant en outre que cette conscience manifeste les attributs divins (aishwarya), comme des facultés transcendantes, par là même qu’elle est unie à l’Essence Suprême. C’est là le résultat de la libération complète, obtenue dans la plénitude de la Connaissance Divine ; quant à ceux dont la contemplation (dhyâna) n’a été que partielle, quoique active (réalisation métaphysique demeurée incomplète), ou a été purement passive (comme l’est celle des mystiques occidentaux), ils jouissent de certains états supérieurs, mais sans pouvoir arriver dès lors à l’Union parfaite (Yoga), qui ne fait qu’un avec la « Délivrance ». »

Pourquoi M. Sablé n’a-t-il pas cité ces passages de façon claire ? Pourquoi n’a-t-il pas laissé la parole à René Guénon plutôt que de faire semblant de le citer. Sans doute pour pouvoir plus facilement travestir sa pensée.

On trouve quelques pages plus loin :

« La différence entre l’infini métaphysique, qui est le seul véritable infini, sans partie, insécable, simple, un, et l’indéfini, qui n’est qu’une extension du fini dont on peut sans cesse repousser la limite, est fondamentale dans l’œuvre de René Guénon. Si nous voulons traduire cette différence en termes communs, nous dirons qu’elle est celle de Dieu et du monde, bien que René Guénon ait très largement évité le mot « Dieu », qui prête à confusion, et qu’il faille entendre « monde » dans son sens le plus général comme ce qui comprend la totalité de la manifestation. Du fait que la manifestation est le déploiement de l’infini, elle est, elle aussi, sans bornes. Cependant, au regard de l’individu, elle n’apparaît pas comme une Totalité, une Unité, mais comme une réalité fragmentée, divisée, composée d’une multiplicité de parties. C’est cette réalité multiple que Guénon nomme l’indéfini. (p. 35) »

Pourquoi vouloir « traduire en termes communs »? On sombre alors dans l’erreur complète. La manifestation n’est pas le déploiement de l’Infini. René Guénon n’a pas manqué d’expliquer que la manifestation dans son intégralité était véritablement NULLE au regard de l’Infini. L’aberration va devenir totale, lorsque l’auteur va ensuite s’appuyer sur la théologie pour soi-disant « nous aider à comprendre cette distinction entre infini et indéfini ». Il cite alors Nicolas de Cues qui n’est certainement pas un métaphysicien même s’il développe dans son œuvre le point de vue de la théologie dite négative.

Mais pourquoi, encore un fois, E. Sablé ne cite pas directement René Guénon. Ainsi peut-on lire au chapitre I, intitulé l’Infini et la possibilité de l’ouvrage Les États multiples de l’être:

« Pour bien comprendre la doctrine de la multiplicité des états de l’être, il est nécessaire de remonter, avant toute autre considération, jusqu’à la notion la plus primordiale de toutes, celle de l’Infini métaphysique, envisagé dans ses rapports avec la Possibilité universelle. L’Infini est, suivant la signification étymologique du terme qui le désigne, ce qui n’a pas de limites ; et, pour garder à ce terme son sens propre, il faut en réserver rigoureusement l’emploi à la désignation de ce qui n’a absolument aucune limite, à l’exclusion de tout ce qui est seulement soustrait à certaines limitations particulières, tout en demeurant soumis à d’autres limitations en vertu de sa nature même, à laquelle ces dernières sont essentiellement inhérentes, comme le sont, au point de vue logique qui ne fait en somme que traduire à sa façon le point de vue qu’on peut appeler « ontologique », des éléments intervenant dans la définition même de ce dont il s’agit. Ce dernier cas est notamment, comme nous avons eu déjà l’occasion de l’indiquer à diverses reprises, celui du nombre, de l’espace, du temps, même dans les conceptions les plus générales et les plus étendues qu’il soit possible de s’en former, et qui dépassent de beaucoup les notions qu’on en a ordinairement ; tout cela ne peut jamais être, en réalité, que du domaine de l’indéfini. »

Les choses deviennent tellement claires et précises chez René Guénon. Nous ne pouvons que regretter encore une fois que l’auteur de cet opuscule ait privé ainsi ses éventuels lecteurs de cette chance de lire quelque chose de vraiment intelligent.

Une nouvelle phrase d’E. Sablé parmi tant d’autres où l’absurdité se déploie pleinement.

« La notion guénonienne d’infini permet de résoudre une autre énigme, celle de l’origine du monde (p. 44). »

Un  « infini guénonien », personne ne l’avait encore proposé, M. Sablé a osé. La palme du ridicule lui échoit sans contestation possible.

Une dernière chose et celle-ci est une multi récidive comme on le verra. M. Sablé veut trouver des confirmations des écrits de René Guénon chez des auteurs ou des personnages à l’antipode le plus complet de la doctrine qu’il a enseignée dans son œuvre. Ainsi il écrit:

« Ce qu’écrit Guénon rejoint les conclusions d’un paléontologue comme Michael Denton, directeur du Centre de recherche en génétique humaine de Sydney. Dans Evolution. Une théorie en crise où il montre les limites de la conception darwinienne … (p. 48) »

La conception darwinienne limitée ou non est une pure absurdité dans son principe. On ne peut dans le meilleur des cas retenir des écrits de Darwin que quelques considérations analytiques sans grand intérêt si ce n’est que pour des applications pratiques. Mais il est vrai que c’est la seule chose qui intéresse nos contemporains.

Nous devons maintenant parlé d’un autre passage assez curieux de son opuscule. M. Sablé semble aimer particulièrement le vocabulaire scientifique qu’il manie d’ailleurs à tort et à travers. Voici ce passage significatif (p. 37) :

« Ainsi, l’infini se « diffracte » pour donner la multiplicité indéfinie des formes de la manifestation, qui est réellement sans limite aucune, de même qu’il n’y a pas de limite à la suite des nombres. Gaston Georgel, qui a prolongé les études de Guénon sur les cycles qui ordonnent le déploiement du cosmos en les appliquant à l’histoire de l’humanité, parle d’une « subdivision indéfinie des cycles en périodes de plus en plus courtes, chacune se présentant comme un reflet ou une miniature du cycle total » [Les Quatre âges de l’humanité, Milan, Archè, 1976, p. 79.] En mathématiques, ces divisions successives, selon le même mode, sont appelées fractales. Ce sont des objets qui se reproduisent en gardant toujours le même aspect à des échelles différentes. « Dans un triangle fractal, chaque petit triangle est structurellement identique au grand triangle. » Les nuages, les arbres, les montagnes, les vaisseaux sanguins, les poumons sont des fractales dans la mesure où on peut les diviser en sections de plus en plus petites, toujours semblables. Il semble donc que l’indéfini, c’est-à-dire le monde, obéisse à cette loi de fractionnement qui reproduit le même motif à des échelles différentes. »

Le choix de la diffraction pour illustrer le processus de la manifestation paraît peu parlant. Cette assimilation de L’Infini à une onde et de la manifestation à ses interférences n’évoque pas grand-chose : une conception de l’Infini au rabais façon monde moderne.

C’est nous qui avons souligné le mot « fractales ». Le terme fractal a été utilisé pour la première fois en 1975 par Benoit Mandelbrot pour son livre intitulé justement : Les objets fractals – forme, hasard et dimension.

Au chapitre premier, introduction, on peut y lire ceci (passages en gras soulignés par nous):

«Dans le présent essai, des objets naturels très divers, dont beaucoup sont fort familiers, tels la Terre, le Ciel et l’Océan, sont étudiés à l’aide d’une large famille d’objets géométriques, jusqu’à présent jugés ésotériques et inutilisables, mais dont j’espère montrer tout au contraire qu’ils méritent, de par la simplicité, la diversité et l’étendue extraordinaires de leurs nouvelles applications, d’être bientôt intégrés à la géométrie élémentaire. Bien que leur étude appartienne à des sciences différentes entre autre la géomorphologie, l’astronomie et la théorie de la turbulence, les objets naturels en question ont en commun d’être de forme extrêmement irrégulière ou interrompue. Pour les étudier, j’ai conçu, mis au point et largement utilisé une nouvelle géométrie de la nature. La notion qui lui sert de fil conducteur sera désignée par l’un de deux néologismes synonymes, « objet fractal » et « fractale », termes que je viens de former, pour les besoins de ce livre, à partir de l’adjectif latin fractus, qui signifie « irrégulier ou brisé ». » (Editions Flammarion, collection champs, quatrième édition, 1995, p. 5)

Dans son ouvrage intitulé Le monde fascinant des objets fractals publié en 2015 aux Editions Ellipses, Florence Messineo pose cette question (p. 11) :

« Qu’est-ce qu’une figure fractale ? » Et donne cette réponse :

« Les figures fractales sont auto-similaires, c’est-à-dire que si on zoome à n’importe quel endroit de la fractale, on retrouve la même structure que celle de la fractale dans son ensemble quelle que soit l’échelle où l’on se place. »

On voit ainsi que ce qui caractérise un objet fractal c’est sa totale uniformité. De l’indéfiniment petit à l’indéfiniment grand on doit y retrouver la même structure, la même forme géométrique. Ainsi lorsque M. Sablé nous indique que le monde manifesté est un fractale, il veut nous faire comprendre qu’il n’est que la répétition de l’indéfiniment petit à l’indéfiniment grand de la même structure. En chaque instant qui est toujours de la même nature, se développe la même chose dans un espace toujours identique à lui-même… Le Principe répèterait ainsi indéfiniment la même chose, les possibilités de manifestation seraient ainsi réduites à une uniformité inconcevable…Une absurdité totale. On sait que la science moderne considère que le temps est uniforme. Mais la doctrine traditionnelle nous explique bien au contraire que le temps est qualifié et que malgré les apparences il ne s’écoule pas de façon linéaire mais de façon « cyclique ». Par conséquent en rien la doctrine cyclique ne peut répondre à la modélisation fractale. Si un cycle peut toujours être envisagé comme l’enchainement d’un ensemble de cycles plus restreints, chacun des éléments ainsi envisagés s’ils se correspondent les uns aux autres ne s’identifient en rien. Une année dans le Kali-Yuga n’a rien de commun avec une année d’un Yuga précédent. Mais même deux années d’un même Yuga n’ont rien de commun non plus. Aucun jour ne s’identifie à un autre, ils n’ont pas la même qualité même si l’on veut penser qu’ils ont la même durée. De façon générale, chaque élément cyclique constitutif d’un cycle plus vaste est unique en lui-même et cela jusqu’à l’épuisement de l’indéfinité. Ce qui vient d’être dit concernant le temps est tout aussi valable pour les autres conditions de l’existence corporelle comme l’espace par exemple. Ces conditions doivent être toujours envisagées selon deux aspects au moins, l’un quantitatif et l’autre qualitatif.

Pourquoi vouloir faire un lien entre l’œuvre de René Guénon et cette théorie fractale dont le modernisme ne peut être que suspect ? Cette nouvelle géométrie qui caractérise l’objet fractal ne peut en aucun cas servir de support symbolique à des notions traditionnelles. On aura même noté que M. Mandelbrot ne considère le domaine ésotérique que comme celui de l’ignorance et de l’inutilité. Le mot « fractal » signe évident du « règne de la quantité » n’a aucune légitimité à figurer dans un discours qui se veut authentiquement traditionnel.

M. Sablé se fait ainsi l’écho (volontairement ou involontairement ?) de cette vulgarisation scientifique qui voit des objets fractals partout. Les théories développées par M. Mandelbrot ont été simplifiées pour les rendre plus accessibles et ainsi croit-on voir des fractales dans les manifestations du développement naturel. Par cet effet de la subversion moderne ce qui ne devait être reconnu que comme un développement lié au principe cyclique se voit reconnu comme un développement fractal.

Un autre auteur semble bien avoir été victime de cette même confusion. Il s’agit de M. Gauthier Pierozak auteur de ce fameux « Index ». On peut en effet lire cette présentation sur un site (https://fr.ulule.com/archives-charbonneau-lassay):

« Gauthier Pierozak étudie depuis plus de 25 ans le symbolisme en général, et le symbolisme chrétien et graalique en particulier. Il rassemble les publications d'auteurs comme René Guénon ou Louis Charbonneau-Lassay, et il dédie son temps personnel à faciliter la transmission de leurs œuvres aux générations futures. Gauthier Pierozak est en particulier l'auteur d'un outil de travail très précieux pour les lecteurs de René Guénon, qui permet une recherche par mots-clefs de son œuvre entière: www.index-rene-guenon.org, outil qui pourra être adapté à un site de consultation des archives de Charbonneau-Lassay. »

On connait ainsi maintenant officiellement l’auteur de cet Index, qui est également l’auteur notamment d’un texte intitulé L’Hermétisme et les cycles cosmiques. Ce texte a été publié dans des revues et des sites :


Oriens en français et en anglais,  http://oriens.regnabit.com/regnabit.htm


Voici donc ce qu’écrit M. Pierozak au commencement de son article (les passages en gras sont ceux qui ont été soulignés par M. Pierozak) :

« L’étude de la doctrine métaphysique, et en particulier de ce qui se rapporte à la manifestation en tant que détermination d’une possibilité particulière dans l’Absolu du Principe suprême, permet de remarquer des lois cosmiques générales que l’on peut particulièrement comparer à des fractales mathématiques. René Guénon en parle clairement dans son œuvre, en particulier lorsqu’il présente la doctrine des cycles cosmiques. Il dit ainsi qu’un cycle quelconque peut être « considéré comme une fraction d’un autre cycle plus étendu; mais, en vertu d’une certaine loi de correspondance, chacun des cycles secondaires reproduit, à une échelle plus réduite, des phases qui sont comparables à celle des grands cycles dans lesquels il s’intègre. Ce qui peut être dit des lois cycliques en général trouvera donc son application à différents degrés : cycles historiques, cycles géologiques, cycles proprement cosmiques, avec des divisions et des subdivisions qui multiplient encore ces possibilités d’application. D’ailleurs, quand on dépasse les limites du monde terrestre, il ne peut plus être question de mesurer la durée d’un cycle par un nombre d’années entendu littéralement ; les nombres prennent alors une valeur purement symbolique et ils expriment des proportions plutôt que des durées réelles. » [René Guénon, L’Ésotérisme de Dante, Les Cycles cosmiques, Gallimard, 1957, p. 62.] Il s’agit bien ici de la description d’un principe fractal et c’est ce qui permet de justifier, si besoin était encore, l’emploi de l’analogie ou de la correspondance, et l’usage de symboles pour signifier des concepts métaphysiques élevés et souvent inexprimables, par le constat que le plus petit peut symboliser le plus grand, par loi d’analogie. »

Dans une note l’auteur avait précisé concernant le mot « fractale » :

« Terme mathématique, provenant de la racine latine fractus, ou « fraction », et  désignant un objet dont la structure est invariante par changement d’échelle. En d’autres termes, on retrouve la même structure générale quelle que soit la distance où l’observateur se place par rapport au sujet, de l’indéfiniment petit à l’indéfiniment grand. »

On constate que là aussi la confusion est totale. Lorsque René Guénon explique que tout s’accomplit en fonction d’UNE CERTAINE LOI DE CORRESPONDANCE, M. Pierozak parle lui d’un pseudo PRINCIPE FRACTAL. René Guénon n’a jamais parlé CLAIREMENT !! de ces objets fractals et pour cause le mot a été inventé bien après son décès. Cette loi de correspondance qui respecte les aspects quantitatifs et qualitatifs de la manifestation ne peut en aucun cas être représentée par une modélisation aussi simpliste et réductrice que celle proposée par  les objets fractals.

M. Pierozak devient particulièrement le jouet de cette subversion lorsqu’il nous présente une photo d’un coquillage, un nautile, et qu’il indique en la commentant:

« Le nautilus est un exemple de fractale dans la nature. Quelle que soit la distance où on l’observe, on obtient la même structure géométrique. »

Ce coquillage n’est pas un objet fractal. Il n’y a pas d’objet fractal dans la nature. Par contre ce coquillage est une superbe illustration du principe des cycles. Tout en correspondance, sans aucune uniformisation, l’animal occupe successivement les différentes cavités qu’il a lui-même secrétés au rythme de ses cycles de développement et de croissance. Et il n’y a jamais eu deux nautiles identiques et il n’y en aura jamais même à l’épuisement de l’indéfini. Chaque nautile est unique à l’image du Principe. Car si tout est bien un reflet du Principe, il n’y a que l’Infini qui soit identique à l’Infini. Chaque chose de l’indéfiniment petit à l‘indéfiniment grand est à l’image du Tout mais seul le Tout est identique à lui-même.

On sait que cette géométrie fractale est directement liée au développement de l’informatique. L’objet fractal n’est qu’une itération d’un module unique où ne varie qu’une seule option: l’échelle. Les ordinateurs sont ce qui se rapproche le plus de la quantité pure avec ce raisonnement binaire et une puissance infrahumaine effroyable, puissance d’ailleurs qui ne fait que croître. Voir des fractales partout c’est d’une certaine façon annoncer la victoire de la quantité pure.

L’œuvre de René Guénon  a été numérisé. Elle a été totalement ingérée par cette logique binaire. Est-ce pour de bonnes raisons ? On peut dans notre monde uniformisé obtenir en quelques millisecondes n’importe quel extrait de cette œuvre. Mais est-on certain pour autant de bien pouvoir en saisir la quintessence?   Son accessibilité virtuelle quasi instantanée est-elle le gage d’une meilleure assimilation potentielle ? On peut en douter.

Tradition, initiation, conversion – une image.


Tradition, initiation, conversion – une image.



Retenons cette image de notre vie spirituelle vue comme un chemin que l’on doit parcourir. La façon la plus lente et la moins efficace de parcourir un chemin est de le faire à pied. Si l’on pouvait disposer d’un moyen plus rapide et plus facile comme un cheval, ce parcours pourrait s’accomplir d’une façon plus efficace.

Supposons que dans cette image le cheval représente les moyens que la Tradition peut mettre à notre disposition pour tendre à nous réaliser.

Tant que le Manvantara n’est pas trop avancé, la Tradition n’est pas encore entrée dans cette phase où la séparation entre l’exotérisme et l’ésotérisme devient nécessaire. On reçoit un seul cheval capable d’aller à toutes les allures. En fonction des aptitudes de chaque être, certains seront capables de faire aller leur monture au galop et d’autres simplement au trot. Certains ne réussiront même pas à atteindre le  trot et ne pourront aller qu’au pas ce qui reste toujours préférable à la marche à pied. Enfin certains tomberont de leurs montures et devront poursuivre à pied en tenant ce cheval par les rênes. Toutes les possibilités doivent être envisagées.

Le Manvantara touchant à sa fin, la nécessité de la séparation entre exotérisme et ésotérisme apparaît alors et il faut envisager dans cette image la fourniture d’un premier cheval limité à l’exotérisme et donc limité dans ses allures (le pas, éventuellement le trot mais pas de galop). Si l’on est initié (même simplement virtuel), dans cette image, on pourra se voir attribuer un deuxième cheval. Et là encore de nombreux cas de figures. Pour pouvoir chevaucher sur le second cheval il faut pouvoir abandonner ce premier cheval et cet abandon ne peut se faire que si l’on a réalisé et donc épuisé toutes les exigences de l’exotérisme. Ce premier cheval doit disparaître dans une sorte d’accomplissement pour qu’il ne reste plus que le second cheval capable lui d’aller à toutes les allures et aussi au galop. L’initié qui ne pratique pas son exotérisme et ne le dépasse pas ne verra pas le premier cheval disparaître et il ne pourra jamais chevaucher au galop avec le second cheval. Il se verra ainsi chevauchant le premier cheval en tenant par les rênes le second cheval de son initiation. Voici l’image de l’initié virtuel, un cavalier incapable d’atteindre au but de son exotérisme et encombré d’un second cheval d’une certaine façon totalement inutile.

Imaginons maintenant un être qui se convertit. Il se retrouvera alors avec deux chevaux pour l’aspect simplement exotérique. Puisque, de même que l’influence spirituelle ne peut s’effacer, dans cette image, le premier cheval (correspondant au rattachement à la première tradition) ne pourrait disparaître lui aussi que si le second cheval exotérique à atteint son but. L’être chevauche alors le second cheval (correspondant à l’exotérisme de la tradition de conversion) en tenant par les rênes le premier cheval (correspondant à son premier rattachement traditionnel).

Imaginons maintenant que cet être qui s’est converti était un  initié virtuel dans sa première tradition. Il disposera alors de trois chevaux et sera alors encombré par deux chevaux. Les deux chevaux de la première tradition qu’il tient par les rênes et le cheval exotérique de sa nouvelle tradition de rattachement qu’il est entrain de chevaucher.

Imaginons enfin qu’il soit de plus initié dans cette nouvelle tradition. Il disposera de quatre chevaux et sera alors encombré par trois chevaux. Deux chevaux pour la première tradition (l’un pour l’exotérisme et l’autre pour l’ésotérisme) et deux autres chevaux pour la seconde tradition (l’un pour ce nouvel exotérisme qu’il chevauche et l’autre pour l’ésotérisme)

Imaginons maintenant un être qui soit rattaché à plus de deux traditions… On peut dans cette image qui tourne au cauchemar ajouté un cheval à chaque réception d’une influence spirituelle, à chaque grade, chaque degré d’initiation virtuel, etc.

Si maintenant, on envisage le cas d’un être ayant une sagesse innée et donc une réalisation effective très précoce (Râmana Maharshi en constitue un bon exemple), cet être pourra être rattaché à autant d’aspect exotérique et ésotérique qu’il le souhaite sans avoir à être encombré, dans cette image, par les chevaux correspondant puisqu’il a déjà obtenu la plénitude de la réalisation. Il n’a plus à chevaucher puisque pour lui tout est déjà accompli effectivement.

Dans un autre registre beaucoup plus sombre et pour prendre encore cette image, la contre tradition, comme la contre initiation, engendre de son côté autant de chevaux rétifs. Mais pour le moins le chemin se fait alors à rebours…


Passage à tabac sans tabac


Passage à tabac sans tabac



Je ne souviens d’un temps pas si lointain où venant de l’extérieur par  une froide journée d’hiver dans son air vif et peu pollué on retrouvait la douce chaleur d’un bistrot et son air saturé des fumées des cigarettes. Le temps a fait son œuvre. Aujourd’hui il n’y a plus de fumée dans les cafés mais c’est l’air extérieur qui est  irrespirable, il pue tout simplement. C’est l’air ambiant de toute la planète qui est dégradé. Ce que l’on croit gagner d’un côté en limitant la présence de la fumée du tabac, on le perd autrement et beaucoup plus par cette nouvelle pollution mondiale. Le bon peuple est assez naïf pour croire que la direction que l’on prend est toujours celle du  progrès qui est censé nous mener dans le meilleur des mondes…

Ortygia - Syracusa – Sicilia

Ortygia - Syracusa – Sicilia

Si l’on observe une carte de la mer Méditerranée on peut constater avec peut-être un peu de surprise que la Sicile en occupe comme le centre de gravité et même d’une certaine façon comme le centre géographique. Cette île singulière, volcanique et donc étonnamment fertile, a toujours été au fil des temps le point de rencontre et d’affrontement des plus grandes civilisations. Pourquoi ne pas évoquer, par exemple, l’Empereur Frédéric II, le poète controversé, personnage certainement méconnu qui n’hésite pas à accueillir dans son royaume de Sicile des représentants des grandes traditions et notamment des trois traditions du Livre.
Au chant XX (v. 383) de l’Odyssée, le nom de la Sicile (Sikelé) est explicitement mentionné. On le retrouve au chant XXIV (v. 211, v. 366 et v. 389) où il est fait mention d’une très vieille femme amenée justement de Sicile. On trouve également dans ce même dernier chant (v. 307) le nom de « Sicanie » (Sikanié) en relation avec le nom donné à certains habitants de la Sicile, les Sicanes.
Au chant XI (v. 107) puis au chant XII, on nous parle d’une île : l’ « Île du Trident ». Odyssée, XII, v. 127-128:
« Puis vous arriverez à l’ « Île du Trident » (Thrinakié) où pâturent en foule les vaches du Soleil (Hélios) et ses grasses brebis. »
On parle aussi de cette île comme de l’ « Île du Soleil ». Au chant XII, v. 263, « cette île admirable du Soleil (Hélios) ».
Ce nom d’ « Île du Soleil » peut être mis d’une certaine façon en correspondance avec la « Syrie » primitive qui désigne la « terre solaire ».
Ainsi dès l’antiquité ces expressions sont utilisées pour désigner la Sicile. Ce qui ne veut pas dire que ces mêmes expressions ne puissent pas s’appliquer à d’autres lieux aujourd’hui transformés ou proprement disparus.
L’historien Thucydide nous rappelle d’autre part que cette île a été précédemment connue sous le nom de « Trinacrie » (Trinakriè) que l’on peut interpréter par des expressions comme « Île aux Trois Caps » ou « Île du Triangle ».
Un symbole ancien est toujours utilisé pour représenter cette île. Un symbole qui évoque le mouvement autour d’un centre (voir une photo de ce symbole en fin d’article). On peut établir une certaine correspondance avec le swastika en notant que si ce dernier est un symbole polaire, le symbole appliqué à la Sicile est lui manifestement solaire.
Intéressons-nous également à cette petite île au large de la cité de Syracuse et citons le texte de Luigi Pareti paru dans l’ouvrage du photographe Leonard von Matt et intitulé  La Sicile antique (Hachette, 1960, p. 21) :
« Syracuse, qui fut la ville la plus importante de l’île, s’efforça pendant des siècles d’unifier politiquement la Sicile […] D’après Antiochos, historien de Syracuse [référencé par Thucydide], seuls les éléments des civilisations dorienne et corinthienne, qui étaient les plus importantes, parvinrent à s’imposer vraiment. Ce même Antiochos place la fondation de Syracuse dans les années 733 et 732 avant J.-C. Mais Philiste, autre historien de Syracuse [référencé par Diodore de Sicile], la situe dans les années 756 et 755. Il s’appuie, pour cette affirmation, sur la présence d’une première colonie ionienne qui venait de Chalcis et qui ne put se maintenir sur ces lieux. L’île d’Ortygie constituait le noyau de la ville grecque. Ainsi qu’un grand nombre de villages elle avait été habitée au cours de la deuxième et de la troisième période sicule, car, par sa situation même, elle offrait une très grande sécurité. En outre, le grand port voisin favorisait les échanges maritimes […] Les grands secteurs occupés par les Syracusains s’étendaient au Nord jusqu’à la limite de la région de Mégare, à l’Ouest jusqu’à celle de Géla. Un certain nombre d’agglomérations jalonnaient ce territoire […] A l’intérieur, il faut signaler surtout Hybla Heraea qui correspondait peut-être à Ragusa-Inferiore [de nos jours nommé aussi Ragusa Ibla ou Ibla] »
Sur ce toponyme d’ « Ortygie », voyons aussi ce que nous disent les hellénistes comme par exemple Jacques Tréheux dans son article intitulé Ortygie et paru dans le Bulletin de correspondance hellénique, année 1946. Reproduit intégralement sur internet à cette page : http://www.persee.fr/doc/bch_0007-4217_1946_num_70_1_2607
Le nom d'Ortygie se rencontre donc trois fois dans la tradition homérique. Au chant V de l'Odyssée (v. 121-124), la déesse Artémis transperce de ses flèches, sur cette île d’Ortygie, le chasseur Orion.
 Si l’on se reporte maintenant au chant XV (v. 403-404), on peut y lire:
« (...) On appelle Syrie (Surih) une île qui se trouve au-delà (en haut, au-dessus) d’Ortygie (Ortugia), où sont les révolutions (tropos) du Soleil. »
Enfin dans l’Hymne homérique à Apollon (v. 14-16) : « Salut, ô heureuse Lèto, car tu as enfanté d'illustres enfants, le Roi Apollon et Artémis joyeuse de ses flèches, celle-ci dans Ortygie et celui-là dans l'âpre Délos… »
Cette île d’Ortygie au large de la Sicile était donc propice avec sa source, la fontaine Aréthuse, et la configuration d’une côte avec ces possibilités d’y installer plusieurs ports. Atouts déterminants.
Sur les monnaies syracusaines antiques ont trouve notamment cette représentation d’une tête de femme entourée de quatre dauphins. S’agit-il de la déesse Artémis dont le culte fut importé à Ortygie (Syracuse) par des colons ? On rapporte que c'est pour Artémis que les nymphes auraient fait jaillir la fontaine Aréthuse.
La Cathédrale de Syracuse témoigne de cette continuité dans la réception des influences célestes qui est la marque de la véritable spiritualité. Les colonnes du temple antique qui s’élevait en ce lieu subsistent encore. Les espaces libres entre les colonnes ayant été comblés sur la périphérie, ce monument aura ainsi été transformé au fil du temps pour accueillir le culte des représentants des traditions du Livre. Sa façade baroque par son exubérance vient renforcer un peu plus la sérénité et le dépouillement des volumes intérieurs. (Voir les photos jointes)









mardi 30 octobre 2018

La grandeur illusoire de la technologie


La grandeur illusoire de la technologie

Les bouilloires diaboliques

Un tsunami terrible approchait de la côte du Japon et dans la centrale de Fukushima que faisait-on ?

La même chose que les autres jours de l’année. Le programme n’avait pas changé et l’objectif fondamental non plus : faire bouillir de l’eau. Toute l’activité de la centrale ne tourne en effet qu’autour de cet objectif : obtenir de la vapeur d’eau très chaude et en très grande quantité.

Et puis la grosse vague d’eau de mer a tout submergé. Les grosses bouilloires n’ont pas apprécié la douche froide. Elles se sont détraquées et ont permis à ce combustible bien singulier (qui fournissait cette chaleur pour faire bouillir cette eau fameuse) de se détendre dans l’atmosphère sur un périmètre tout à fait fantastique et de se  déposer partout où le vent l’a emporté. Ce combustible qui paradoxalement était justement depuis la nuit des temps éparpillé sur notre terre à l’état de trace infime totalement  inoffensive, s’est retrouvé concentré par la volonté de l’homme et en ce jour de tsunami à nouveau éparpillé mais cette fois de façon beaucoup plus concentré et de ce fait particulièrement létal.

Morale de cette histoire, on devrait parfois y réfléchir à deux fois avant de faire bouillir de l’eau au Japon où ailleurs quand ce n’est pas pour faire infuser du thé.




MuHaMMaD et le nombre π

Orientalisme soufi
MuHaMMaD et le nombre π

Comme l’indique l’éditorial internet de la revue:
« Science sacrée est une revue d’études traditionnelles réservée à toutes les expressions de la tradition perpétuelle et unanime. Placée sous l’égide de l’enseignement de René Guénon, elle suit également les prolongements doctrinaux et les applications de l’œuvre guénonienne selon l’orientation spirituelle de Michel Vâlsan (Cheikh Mustafa ‘Abd-al-’Azîz en Islam), le fondateur reconnu des études en Occident sur Muhy-d-dîn Ibn ‘Arabî, le plus grand Maître de l’ésotérisme islamique. » (http://www.sciencesacree.com/carnet/articles-divers/)
Rappelons que Ibn ‘Arabî a vu le jour en Espagne et donc en Occident. Michel Vâlsan apparaît donc plutôt comme un fondateur des études francophones sur Ibn ‘Arabî en Occident. On aura soin de se reporter à ce que René Guénon écrivait concernant Dante et Ibn ‘Arabî dans Le Roi du Monde.
Cet éditorial indique également que :
« Fondée en 2001 par Muhammad Vâlsan, Science sacrée reprend son activité éditoriale, selon de nouvelles modalités, en cette date du 16 février 2011, correspondant au Mawlid an-Nabî 1432, dix ans après sa première publication. Souhaitant une meilleure diffusion, elle fait aujourd’hui appel au support internet… »
Notre attention se portera sur la reproduction de deux articles de son fondateur. Il s’agit respectivement du texte portant le titre : À l'Échelle de la prière en Islam et du texte intitulé : L'Emir et le droit humanitaire.
Dans le premier texte l’auteur s’attache à développer diverses considérations sur le terme mi’râj qu’il traduit en français par le mot échelle. Il est amené à déclarer :
« L’idée d’“échelle” induit celle de “mesure”. Cela nous amène à analyser la valeur numérique 314 du mot qui la désigne en arabe. Ce nombre est l’expression non décimale du rapport constant qui unit le diamètre d’un cercle à sa circonférence appelé Π (Pi). Noté arithmétiquement aujourd’hui sous la forme approximative 3,14, il fait partie des nombres qualifiés d’irrationnels. Le Coran, qui révèle toutes les sciences, informe que lors du Mi‘râj le Prophète r arriva à « la distance de deux arcs ou plus près (qâba qawsayn aw adnâ)». La formule employée s’avère étonnamment technique, mais en terme géométrique cette fois. Les deux arcs peuvent être interprétés comme les deux demi-cercles permettant, grâce au rapport de l’échelle 314, l’accès à proximité du centre, “ou plus près”, à savoir au centre même. »
En note l’auteur reproduit le calcul qui permet d’obtenir 314 à partir du mot mi’râj:
 « Mi‘râj = M + ‘ + r + a + j = 40 + 70 + 200 + 1 + 3 = 314. »
Contrairement à ce que déclare l’auteur le nombre 314 n’est pas l’expression non décimale du nombre π (Pi). Aucun nombre que l’on nomme entier ne peut être l’expression du nombre π. On peut par contre dire que ce nombre 314 ou le nombre 3,14 sont des expressions approximatives du nombre π.
Pour bien se faire comprendre on peut dire que 314 est l’expression exact du nombre 314, mais que par exemple 315 est une expression approximative du nombre 314. L’approximation à une unité près est tout à fait acceptable pour quelqu’un par exemple qui juge qu’il est plus simple mentalement de faire des calculs avec des multiples de 5. Mais bien évidemment 314 n’est pas 315. Et donc le nombre π ne correspond ni à 3,14 ni à 314. Pour être exact π est égal à 3,14 (ou à 314) plus un petit quelque chose que nous nommerons x. Ainsi de façon exact on peut écrire que π = 3,14 + x. On remarque immédiatement que cette quantité x est égale à π moins 3,14. On peut donc écrire de façon parfaitement exacte que  π = 3,14 + (π – 3,14) ou si l’on préfère ne pas employer des décimales π = 314 + (π – 314).
Le nombre π est en effet nommé en mathématique moderne « nombre irrationnel ». Rappelons qu’un nombre est qualifié de rationnel lorsqu’il n’est pas entier mais que l’on peut malgré tout le représenter par le rapport entre deux nombres entiers. Ainsi la fraction 2/3 est un nombre rationnel. Un nombre irrationnel sera donc un nombre qui ne peut être ni représenté par un nombre entier ni par un nombre rationnel comme le nombre π ou pour prendre un autre exemple le nombre qui multiplié par lui-même donne le nombre 2 c’est-à-dire ce que l’on nomme racine de 2 (√2). Un nombre irrationnel n’est pas un nombre fou. C’est un nombre parfaitement compris mais qui ne peut pas être représenté de façon simple pour cela on le représente par un symbole profane.
Dans l’extrait que nous avons reproduit Muhammad Valsân commente un verset du Coran. Mais comme nous venons de le voir ce que l’auteur nomme « Echelle 314 » ne peut en aucune façon être nommé « Echelle π ». Il est donc impossible d’obtenir avec cette « Echelle 314 » des demi-cercles. Seul le nombre π permet de produire un cercle ou des demi-cercles à partir d’un centre. Son commentaire est donc proprement erroné. D’ailleurs le verset du Coran parle d’arcs, donc de fragments d’une courbe dont la définition n’est pas précisée ; Cela pourrait être un fragment d’une ellipse ou d’une spirale ou de toute autre courbe plus complexe.
 Curieusement l’auteur dans la suite de son texte reconnaît cette inexactitude mais la justifie de façon peu convaincante et même contradictoire:
« Le fait que le nombre 314 soit une approximation employée sous couvert de termes coraniques se justifie par la doctrine islamique qui, n’envisageant pas de formuler une quelconque identité avec Dieu, préfère évoquer une proximité immédiate avec Lui. Cette proximité est annoncée comme la plus grande dans la prosternation au moment où le point de jonction des deux arcs des sourcils touche le sol. De même, le nombre 3,14 ne permet qu’une approche du rapport exact exprimé par Π. Un célèbre hadith qudsî  laisse entendre que l’identification avec les Attributs divins est toutefois possible à condition d’être opérée par l’Amour divin lui-même. Il est dit en effet : « Mon serviteur ne cesse de se rapprocher de Moi par les œuvres surérogatoires (an-nawâfil) jusqu’à ce que Je l’aime et quand Je l’aime, Je suis son ouïe par laquelle il entend, son regard par lequel il voit et sa main par laquelle il saisit… ». Il nous faudra une autre occasion pour parler du nombre 314 dans le Coran. Nous nous contenterons d’ajouter pour cette fois qu’il constitue la somme arithmétique des lettres complètes de Muhammad, ce qui confère au Prophète r la fonction d’intermédiaire céleste dont l’Echelle est l’un des symboles principaux. »
Voyons donc ce que l’auteur déclare dans le second texte correspondant à « cette autre occasion » :
« Sans entrer dans trop de détails, nous rappellerons qu’il existe un alphabet arabe traditionnel nommé abjad qui classe les 28 lettres arabes en fonction de leur valeur numérique respective, lettres qui correspondent, soit dit en passant, non seulement aux 28 mansions lunaires du mois arabe, mais également aux 28 phalanges des deux mains. René Guénon (1886-1951), qui fut en Islam le Cheikh ‘Abd al-Wâhid Yahyâ, a donné un premier aperçu indispensable des potentialités de cet abjad, en 1938, dans la revue Etudes traditionnelles qu’il dirigea jusqu’à sa disparition. Pour sa part, dans son livre Dhikrâ al-‘âqil wa tanbîh al-ghâfil, “Mémento pour le sagace et avertissement pour l’insouciant”, qu’il adressa aux Français en mai 1855 et qui fut, de ce fait, rebaptisé Lettre aux Français, l’Emir fit une présentation de cet alphabet. Mais c’est toutefois dans un autre ouvrage, rédigé quant à lui en 1849 pendant sa détention à Amboise, qu’il en a fait un usage instructif à bien des égards. L’écrit en question est intitulé Mudhakkirât al-Amîr ‘Abd Al-Qâdir et n’a été publié que récemment à Alger : en 2010. A la page 99 de l’édition, l’Emir décompose les lettres du nom MuHaMMaD pour en tirer les valeurs numériques dites “développées”. Pour cela, ainsi qu’il est d’usage en la matière, il prend chaque lettre écrite du nom en question en tenant compte du signe de redoublement (shaddah) affectant le second mîm. Il obtient de la sorte les cinq lettres mîm-hâ’-mîm-mîm-dâl dont la somme des valeurs numériques donne : (40 + 10 + 40) + (8 + 1) + (40 + 10 + 40) + (40 + 10 + 40) + (4 + 1 + 30) = 314. Nous nous sommes largement expliqués ailleurs sur la symbolique du nombre 314 en tant qu’expression arithmétique du rapport géométrique désigné par la lettre grecque Π (Pi). Ce rapport étant irrationnel, et dans notre optique plutôt supra-rationnel, sa valeur numérique reste nécessairement approximative et se trouve rendue, dans les données traditionnelles qui n’utilisent pas de décimales, par le nombre entier communément noté en trois chiffres : 314. »
Comme nous venons de le dire 314 n’est pas l’expression arithmétique du nombre π  et par conséquent la valeur numérique du nom Muhammad n’a rien à voir avec le nombre π. On ne peut penser un seul instant qu’une correspondance entre le nom du Prophète et le nombre  π ne puisse être qu’approximative. Ou cette correspondance existe (et alors le nombre de son nom « développé » n’a rien à y faire) ou elle n’existe pas mais elle ne peut pas être dans le vague, dans l’inprécision. Le fait que le nombre  π  soit désigné comme «  nombre irrationnel » ne veut pas dire que le rapport qu’il représente soit irrationnel. Cette opposition entre irrationnel et supra-rationnel est totalement inopportune. On ne peut penser que de véritables données traditionnelles confondent le nombre π  avec le nombre 314. C’est la marque de la science moderne d’être approximative et donc d’être fausse. Les sciences traditionnelles sont par contre des sciences exactes. Le monde moderne qui se complait dans l’à-peu-près a même inventé des « calculs d’incertitude », l’exactitude, la Vérité ne l’intéresse pas. Avant même que l’Islam soit une tradition, le monde antique avait parfaitement connaissance que le nombre π ne pouvait être représenté par un nombre entier. Archimède avait même brillamment établi que ce nombre pouvait être circonscrit entre deux nombres « rationnels » en étant  inférieur à 22/7  et supérieur à 220/71. Contrairement à ce que dit l’auteur la valeur numérique du rapport de la circonférence au diamètre d’un cercle est parfaitement exact et non approximative. Cette valeur est justement égale à π. C’est uniquement sa représentation avec des chiffres qui est difficile puisse qu’elle demande le développement indéfini des décimales. Ce qui n’est pas une impossibilité puisque ce développement est malgré tout fini.
Mais voyons comment l’auteur poursuit sa démonstration :
« Nous donnerons un exemple d’une telle occurrence qui va nous permettre de comprendre qu’une relation spéciale existe entre les noms ‘Abd al-Qâdir et Muhammad. Dans la formule coranique mainte fois répétée disant qu’Allah est « sur toute chose Très-Puissant » : ‘alâ KuLli ShaY’in QaDÎR, les trois derniers mots recouvrent des nombres extrêmement parlants. En valeur simple et non plus développée, c’est-à-dire au premier degré, les deux lettres constitutives de KuLl (“toute”) donnent 20 + 30 = 50, tandis que les deux de ShaY’ (“chose”) donnent 300 + 10 = 310. L’addition des deux nombres permet d’obtenir la valeur 360. En ce qui concerne QaDÎR, la somme des quatre lettres donne 100 + 4 + 10 + 200 = 314. On peut constater, dès l’abord, l’identité numérique de Muhammad et de Qadîr et en déduire que le premier étant la couverture du second, il ne l’exprime qu’au deuxième degré. On en déduit encore que la “Main d’Allâh” et la fonction du Prophète ﷺ étant assimilables, comme en apporta la preuve l’épisode du Pacte d’allégeance de Hudaybiyah, l’une ou l’autre étaient susceptibles d’agir au mieux, et même très directement, sous couvert du nom ‘Abd al-Qâdir. »
Après avoir mis en évidence les correspondances numériques des expressions choisies, l’auteur indique : 
« Il nous reste à analyser à présent ce qui unit “toute chose” au “Très-Puissant”, autant dire ce qui relie 360 à 314. C’est ici que le rapport géométrique Π intervient. C’est en effet par son intermédiaire qu’il est possible d’obtenir le diamètre à partir de la circonférence ou l’inverse, or, dans notre exemple, la circonférence est symbolisée numériquement par les 360 degrés du cercle. Ainsi Qadîr est-il l’agent de la puissance mesurée et déterminante Π qui permet à toute chose comprise dans l’Unité principielle d’être manifestée dans le cycle des 360 degrés de l’existence ou, a contrario, d’être réintégrée dans cette Unité. Dans le domaine du Tasawwuf, il existe trois notions fondamentales qui illustrent parfaitement l’opération rendue possible par le rapport envisagé : il s’agit de la Sharî‘ah, de la Tarîqah et de la Haqîqah : la première est comme son nom l’indique la “Grande Voie”, celle de la Loi religieuse extérieure, qui est conçue pour être suivie par tous ; la deuxième est, étymologiquement toujours, la “Voie Etroite” qui ne peut être suivie que par un petit nombre ; et la troisième est la “Vérité” qui, lorsqu’elle est réalisée, donne accès à l’état de l’Homme Universel (al-Insân al-Kâmil). Dans un article intitulé « L’Ecorce et le Noyau », René Guénon relie la Sharî‘ah à la circonférence d’un cercle, la Tarîqah à son rayon et la Haqîqah à son point central. C’est en effet de cette façon qu’il est enseigné dans l’ésotérisme islamique que, partant de la circonférence de la Sharî‘ah, l’initié doit parcourir le demi-diamètre de la Tarîqah pour parvenir au centre de la Haqîqah. Nous conclurons sur ce point en faisant observer que ce que nous pouvons appeler la fonction 314 caractérise l’intermédiaire autorisant un passage de la puissance” à l’“acte” ou, inversement, une réintégration du manifesté au non manifesté. Revêtue du nom Muhammad, elle s’affirme particulièrement dans un rôle de “médiation” (wasîlah) et “d’intercession” (shafâ‘ah). »
L’auteur continue à confondre le nombre 314 avec le nombre π et il introduit une nouvelle confusion cette fois avec le nombre 360. Cette équivalence entre les lettres et les nombres ne concerne que les nombres entiers. Elle ne peut aboutir à la mise en évidence de nombre rationnel ou irrationnel. Il s’agit bien de nombre et non de quantité. Il est ainsi totalement déplacé d’introduire des unités de mesure comme la coudée ou le degré d’angle. Le passage du nombre 360 à la quantité de « 360 degrés » n’est plus une application de cette science des nombres. L’auteur commet d’ailleurs un autre excès en semblant restreindre la quantité des 360 degrés à la notion du cercle. Pour ne donner qu’un exemple parmi une indéfinité d’autres exemples, la somme des quatre angles d’un carré ou d’un rectangle nous donne également cette valeur de 360 degrés (4 fois 90 degrés). Ce rapprochement entre les nombres 314 et 360 ne peut vraiment pas nous mener à la notion de cercle puisque le nombre 314 n’est pas le nombre π et que le nombre 360  ne doit pas être assimilé à une quantité de degrés. Si les nombres en base 10 s’appliquent plus particulièrement à la mesure de la Terre, ceux en base 12 s’appliquent pour la mesure des mouvements du  Ciel (angles avec 360) et notamment du temps (24 heures, 60 minutes, etc.) L’auteur fait d’autre part une curieuse assimilation entre degré d’angle et degré d’existence qui paraît non fondée puisque les équivalences numériques ne sont pas justifiées. Sa « fonction 314 » n’établit une correspondance qu’entre les termes dont le nombre est 314 (comme Mi’râj ; Muhammad, Qadîr) mais pas avec ceux qui ont pour nombre 360.  L’auteur a bien fait de citer René Guénon toujours si clair et si juste, nous ne pouvons que l’encourager à en suivre la rigueur. Nous ne ferons que signaler enfin cette autre impossibilité. L’auteur écrit un peu plus loin:
« Or le grand Prophète-législateur juif reçut quant à lui les Tables de la Loi sur le mont Sinaï. Il est même dit à ce propos que, pour y accéder, la communauté des fils d’Israël partit du désert de Sîn. Le mont en question, qui est identifié à l’Horeb en hébreu, est désigné par divers noms également dans le Coran. L’un d’eux est SaYNÂ dont le nombre est 300 + 10 + 50 + 1 = 361, ce qui s’interprète comme une expression numérique additionnant la circonférence et le centre du cercle. La circonférence autour du point central symbolise le corps enveloppant le cœur et “l’esprit” (al-rûh) puisque, suivant la tradition, c’est dans le cœur que siège l’esprit, le cerveau étant le mirador de son vizir “l’intellect (al-‘aql)”. Dans cette optique c’est la lettre Yâ’ située au sein même du Sîn qui tient lieu du cœur. »
Ce nombre 361 ne peut correspondre à l’addition de la circonférence et du centre du cercle. L’auteur considère en effet que le nombre 360 est en degrés. Si le centre peut correspondre au nombre 1, l’addition de cette unité avec les 360 degrés est impossible. On ne peut pas additionner cette unité sauf à la considérer aussi comme valant 1 degré ce qui est absurde.

Héliocentrisme ou géocentrisme, l’enjeu spirituel


Héliocentrisme ou géocentrisme, l’enjeu spirituel



De nos jours il est habituel et même recommandé de confondre le domaine spirituel avec le domaine scientifique.

Nous citerons un des ouvrages de  Jean Hladik intitulé : Comment le jeune et ambitieux EINSTEIN s’est approprié la Relativité restreinte de POINCARE, Ellipses, 2004. On peut y lire, même si ce n’est pas l’objet du présent article, ce petit passage qui nous en apprend beaucoup sur l’attitude d’un personnage que le grand public considère comme un être exceptionnel (p. 137):

« Sa vie durant, Einstein se proclamera le seul créateur de la Relativité restreinte. Pratiquement jamais, sauf deux mois avant sa mort, il ne rendra hommage à Poincaré. Dès son article de 1905, Einstein ne mentionne aucun des travaux de recherches dont il est redevable ; il ne cite personne comme s’il avait tout inventé par lui-même, alors que même ses biographes les plus inconditionnels reconnaissent qu’il a puisé dans les travaux de recherche de Poincaré. Sa technique, consistant à tirer toute la couverture à lui, va être payante car il va bénéficier de la modestie de Poincaré. »

Il est assez cocasse et bien en accord avec notre monde moderne et sa déification de l’ego de voir que cet individu considéré comme le cerveau le plus brillant de son siècle n’était pas si brillant que cela… L’auteur le démontre, preuves à l’appui, en citant les textes peu connus de Poincaré.

Mais venons-en à cette question du géocentrisme, on peut lire à la page 40 du même ouvrage de Jean Hladik :

 « Le pape Paul V condamne, en 1616, les idées coperniciennes comme contraires aux Ecritures. Il devient alors dangereux de diffuser des ouvrages défendant le système de Copernic. C’est pourtant ce que fit Galilée en publiant Dialogue sur les deux grands systèmes du monde, en 1623 (…) L’ouvrage de Galilée est perçu comme un danger par l’Eglise, et Galilée comparaît devant l’Inquisition. L’issue en est bien connue ; le 22 juin 1633, Galilée abjure, le Saint-Office lui ayant : […] notifié l’ordre de ne plus croire à l’opinion fausse que le Soleil est le centre du monde et immobile, et que la Terre n’est pas le centre du monde et qu’elle se meut, et de ne pas maintenir, défendre ni enseigner, soit oralement, soit par écrit, cette fausse doctrine ; après avoir été notifié que ladite doctrine était contraire à la Sainte Ecriture. Ce n’est que le 31 octobre 1992, soit plus de trois siècles et demi après son procès, que Galilée est réhabilité par le pape Jean-Paul II. Selon la Sainte Ecriture, la Terre se met enfin à tourner. »

On ne peut être étonné de voir qu’un scientifique ne sache faire que de la science. Ainsi Jean Hladik se félicite implicitement de la démarche scientifique de Galilée et déforme le point de vue spirituel puisque le pape n’a bien évidemment pas modifié les Ecritures.

Mais où nous trouvons-nous ? Où se trouve l’observateur ? Dans la Tradition le point de vue retenu est celui d’un être placé sur la Terre. Dans l’état humain on peut dire que « le point de départ » de la réalisation spirituelle est sur notre planète. De ce point de vue, un être par exemple qui médite dans la position du lotus se définira comme immobile. Il voit le Monde se déplacer autour de lui, la Lune, le Soleil, les Planètes, les Etoiles. D’un point de vue pratique et donc relatif cette façon de penser est opérante. On ne reçoit les influences de quelques natures qu’elles soient (physiques, subtiles et spirituelles) qu’à l’endroit où l’on est physiquement. L’être humain avec ce point de vue a eu l’intuition des grands cycles qui ordonnent notre Monde. Il connaît ainsi la précession des équinoxes, les rythmes du Soleil, les phases de la Lune.

A la façon d’un voyageur dans un train, l’être est toujours dans la relativité du mouvement.

Vous êtes dans un train assis sur une banquette. Votre train est en gare où stationne également un autre train. On a tous éprouvé cette sensation. Vous entendez le bruit caractéristique d’un train qui démarre, vous regardez par la vitre et vous voyez un train en mouvement. Mais vous êtes un court instant incapable de discerner si c’est votre train qui vient de s’ébranler ou cet autre train qui stationnait à vos cotés.

De même par l’effet de la rotation de la terre notre corps est soumis à un déplacement journalier phénoménal que nous ne ressentons pas. Si au pôle physique ce déplacement est inexistant, lorsque l’on se situe au niveau de l’équateur, notre corps se déplace à la vitesse logiquement incroyable d’environ 1669 km/h. (Il parcourt les 40074 km de circonférence de la Terre en 24 heures, pour le calcul de cette vitesse selon notre position sur la planète, on pourra en trouver la formule sur ce site : https://www.culture-generale.fr/sciences/49-vitesse-de-rotation-dun-point-sur-la-terre)

Notre corps se déplace également dans un mouvement elliptique autour du Soleil en l’espace d’une année et là encore ce mouvement nous est insensible. C’est donc bien une réalité scientifique la Terre tourne autour du Soleil. Elle n’est pas scientifiquement immobile comme l’affirme symboliquement les Ecritures. Mais le symbole est plus utile que la science. Le symbole lui est opératif et la science est d’autant plus illusoire qu’elle est moderne.

On remarquera que pour Galilée, le Soleil est le centre du monde et paraît immobile. Scientifiquement, Galilée se trompe à son tour. Notre science plus récente nous apprend que notre galaxie se déplace et qu’ainsi le Soleil avec tout le système de nos planètes se déplace. Tout se meut, la belle affaire. La Tradition a toujours déclaré que la manifestation était un perpétuel changement. Mais pour se réaliser il faut bien choisir un « point », un point de référence pour tracer cet axe et cette croix qui peut nous faire sortir du Monde. Et ce « point » il est en nous, peu importe qu’il tourne sur lui-même, ou autour du Soleil, ou qu’il s’éloigne indéfiniment vers les confins indéfinis de notre Monde. On peut très simplement le voir comme parfaitement immobile et au centre de notre Monde et de ce « point » notre ascèse peut débuter.